À la rencontre de

Le Dragon

Ils ont une ligne inimitable. Une grâce sur l’eau qui frôle l’archétype. Les Dragons s’affrontent régulièrement dans la baie de La Baule qui abrite l’une des plus belles flottes de France. 

C’est toujours la même excitation. Quelques minutes avant le départ d’une régate, la concentration est maximale. Le Dragon, né en 1929, est un navire de gentleman. Mais un navire de gentleman qui aime gagner.

« En Dragon, on se heurte au gratin de la voile », sourit Bernard Lauvray dit Le Sbire.

Le marin inscrit pour la première fois au yacht-club « en 1958 ou 60 » a connu la Coupe de l’America avec le baron Bich puis avec Peter Blake, navigué sur Kriter I, Elf Aquitaine, s’est occupé des équipages des différents Gitana d’Edmond de Rothschild. Il a gagné la Fastnet « 3 ou 4 fois », le Spi Ouest France « 7 ou 8 ». Un CV non-exhaustif long comme une vie de passion.

Une passion qui l’amène encore et toujours sur le pont d’un Dragon. « C’est un bateau assez dur en équipage. Quand vous « marchez » en Dragon, c’est que vous êtes bon. C’est un bateau très technique où chaque détail compte ». Toujours fabriqué, le navire dont le plan va bientôt avoir un siècle ne connaît ni Mylar, ni Kevlar ni carbone. Interdit. Mais il a conservé ses trente-deux taquets, autant dire trente-deux points à contrôler par les trois équipiers. À contrôler en permanence. Et à régler. Encore. Toujours. « C’est un amoncellement de petits détails qui permet d’avancer. On change les tensions sur les gréements tout le temps. On enlève ou on reprend 1 mm. C’est un bateau de fou », résume Le Sbire. Pas une seconde de répit pendant une régate. « C’est un bateau où il ne faut jamais se sentir à l’aise. Un bateau sur lequel il faut être odieux. Vous pouvez être bon et avoir un mauvais réglage et perdre des « tôles » sans savoir pourquoi. C’est vraiment la fine fleur de la régate ». Il a longtemps été série olympique et coqueluche des grands de ce monde. Constantin de Grèce, Juan Carlos d’Espagne, le roi de Suède. Les têtes couronnées ont fait ou font du Dragon. Un navire esthétiquement magnifique avec sa grande voile d’avant et techniquement indomptable. Il faut du caractère pour oser s’y frotter. Et à La Baule, on ose.