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Façonnage et Giraud-Bardoux : un héritage centenaire à Vannes

Façonnage et Giraud-Bardoux sont deux entreprises sœurs. La première s’occupe de la confection de rideaux, la seconde fournit les tringles et les systèmes pour les poser. L’origine de la société remonte à 1820. Fondée à Paris, elle s’est installée à Vannes voilà des décennies. Cet héritage, ce sont Cécile Giudicelli et Stéphane Le Mouhaer qui en sont aujourd’hui les dépositaires. Découverte.

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Au petit matin, l’ambiance est déjà à la concentration dans l’immense atelier de Façonnage. Une radio joue tout bas. Devant l’une des tables de travail, Delphine, arrivée ici au début des années quatre-vingt-dix, coud patiemment une passementerie sur un tissu doré. Des rideaux pour l’Arabie. En face d’elle, Sandie s’échine à assembler parfaitement les motifs de deux pièces de tissus. Des rideaux qui doivent habiller les cent trente-cinq chambres d’un palace à Rome.

« Le bouche-à-oreille a payé »

L’atelier n’a pas toujours travaillé pour ces projets parfois fous à l’international. C’est Cécile Giudicelli qui a su tracer une nouvelle voie lorsqu’elle a repris l’entreprise. « Avant de reprendre Façonnage, j’en étais la cliente, sourit-elle aujourd’hui. L’entreprise commençait à décliner et son propriétaire historique souhaitait vendre ou tout arrêter et licencier. Pour moi, ce n’était pas possible de perdre ce savoir-faire ». Elle décide de se lancer. Elle se sert des contacts qu’elle a dans le monde du luxe à Paris ou ailleurs pour donner un nouveau souffle à la maison. « Une partie de mon réseau m’a fait confiance, ça nous a permis de trouver l’élan pour commencer. Ensuite, le bouche-à-oreille a payé ».

« Dans le luxe, ce que l’on cherche, c’est l’exception »

Au passage, il a tout de même fallu réorienter l’atelier et les tapissières, qui ont mis leurs machines à coudre au placard. « Dans le luxe, ce que l’on cherche, c’est l’exception. Et l’exception passe par un travail à la main. La machine, c’est pour le travail standard. Ce qui est formidable ici, c’est que toute l’équipe avait déjà ce savoir-faire, cette technicité, cette capacité de changer de méthode de travail. Rien ne se serait fait sans elles ». Les six tapissières de l’atelier au moment de la reprise sont désormais dix. Et il va peut-être falloir pousser les murs d’ici deux ans pour accueillir de nouvelles personnes. « Je suis fière de ce que nous faisons aujourd’hui, reconnaît Cécile Giudicelli. J’ai eu ce goût du travail de qualité très jeune, quand j’ai appris mon métier de tapissière avec trois meilleurs ouvriers de France ».

« Un corner à La Maison Verlinde et un partenariat avec Blanche Duault »

Ce sont les décoratrices et les décorateurs, les architectes qui font appel aux services de l’atelier. « Nous ne travaillons pas directement pour les particuliers, mais cela ne veut pas dire que nous sommes inaccessibles, bien au contraire. Nous sommes fiers, aussi, de travailler localement pour celles et ceux qui ont envie de poser nos créations aux fenêtres de leurs maisons ». C’est pour cela que la marque a aménagé un corner à La Maison Verlinde et noué un partenariat avec Blanche Duault. « Il n’y a pas de raison que ce ne soient que les palaces de Dubaï ou d’ailleurs qui bénéficient de notre savoir-faire breton », s’amuse la dirigeante. 

Rencontre avec Stéphane Le Mouhaer, président de Giraud-Bardoux

Stéphane Le Mouhaer a repris Giraud-Bardoux, spécialiste de l’accrochage de rideaux, au côté de sa compagne Cécile, qui préside aux destinées de Façonnage. Le couple a su faire passer ces entreprises au savoir-faire incomparable dans le XXe siècle. Rencontre.

Façonnage et Giraud-Bardoux sont deux sociétés sœurs. Qu’est-ce que cela signifie ?

À l’origine, c’est la même société. Elle a été fondée en 1820 et concevait des rideaux et des tringles pour habiller les fenêtres des grandes maisons. Nous avons d’ailleurs hérité des croquis d’époque, un véritable travail d’artiste qui servait à proposer des projets au client. La société a ensuite été scindée en deux unités distinctes : l’une, Façonnage, s’occupait de la confection des rideaux et l’autre, Giraud-Bardoux, était spécialisée dans l’accroche de ces rideaux. Le propriétaire de ces deux entités nous a d’abord cédé Façonnage, puis Giraud-Bardoux quelques années après. 

Vous revenez donc aux origines ?

C’est vrai, d’autant que cette entreprise est une affaire de couple depuis toujours. Mais on revient aussi aux origines parce que le savoir-faire acquis depuis 1820 est toujours là. Il est même remis en lumière par la façon dont Cécile a orienté l’entreprise vers le haut de gamme.

Vous avez également su moderniser ces entreprises…

C’est vrai : le temps s’était un peu arrêté et nous avons su faire entrer l’entreprise dans son époque. Tout ce qui se passe avant la table de travail a été numérisé. Puis, dès que le travail artisanal des tapissières est terminé, nous repassons en mode industriel. Cela veut dire que nous sommes capables d’avoir une véritable planification de notre travail. Le client sait au jour près quand il sera livré. Une de nos forces, c’est de savoir tenir les délais. Sans fausse modestie, je pense qu’aujourd’hui, il n’y a qu’en France que l’on sait faire cela.

Quand Giraud-Bardoux a été mise en vente, n’avez-vous pas hésité avant de reprendre cette entité ?

Il y avait un vrai risque que ce savoir-faire précis, l’accroche parfaite et harmonieuse du rideau ou du store, disparaisse. La beauté de la chose, c’est que l’on n’imagine pas la complexité de ce métier : la tringle doit être parfaitement adaptée au rideau. Elle doit soit embellir la fenêtre, soit disparaître… Aujourd’hui, nous proposons exactement toutes les couleurs possibles, toutes les finitions haut de gamme : le laiton satiné, vernis, ou le traitement canon de fusil. Nous faisons du sur-mesure total, nous les cintrons pour les adapter parfaitement.

Il y a également le choix des embouts…

Nous disposons de quarante mille pièces en stock, avec des embouts qui ne sortent qu’une ou deux fois par an. Mais ils sont là. C’est aussi une partie de notre patrimoine. D’ailleurs, nous sommes propriétaires des moules et nous fondons ce dont nous avons besoin à la demande. 

Considérez-vous que ces entreprises sont aujourd’hui en ordre de marche ?

Nous avons remis ces sociétés dans leur siècle. Mais c’est vrai que notre objectif, c’est qu’elles perdurent. Un jour, nous transmettrons ce patrimoine.

Vous avez désormais l’ambition de faire connaître vos marques et savoir-faire auprès d’un public plus large. Pour quelles raisons ?

Giraud-Bardoux est présent au BHV de Paris, nos créations sont accessibles dans le Morbihan par le biais de Blanche Duault et de La Maison Verlinde. Mais il est vrai que, au fond de nous, nous aimerions que le grand public prenne conscience que non seulement nous existons, mais qu’en plus notre savoir-faire n’est pas forcément réservé à une élite. Nous ne travaillons pas que pour les rois et les princes. Nous travaillons aussi pour des chantiers plus simples. Nous sommes accessibles !

Façonnage
www.faconnage.art

Giraud Bardoux

www.giraud-bardoux.fr

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