Javier Bardem
Javier Bardem était l’invité d’honneur du Festival du cinéma espagnol, à Nantes, début avril. L’acteur est resté trois jours, le temps de présenter une partie de sa filmographie – qu’il a lui-même sélectionnée – et de donner une masterclass devant une salle comble (on vous en parlait dans cet article). Jean-Jacques Lester l’a rencontré pour Action – Le Mag Ciné, sur France Bleu Loire Océan.
Javier Bardem, vous avez donné une masterclass à l’Opéra de Nantes, c’était un cadre exceptionnel pour vous accueillir et on a découvert une vraie bête de scène. Vous ne crevez pas que l’écran, vous êtes aussi à l’aise dans l’improvisation !
Ça dépend du public, mais quand on rentre sur une scène où il y a à peu près trois cents personnes ou plus, et qu’ils vous applaudissent, c’est magnifique. Et ça y est, on se relâche un peu, on se détend parce qu’ils pourraient aussi vous siffler, en fait. Mon objectif, et je crois que nous y sommes tous parvenus, c’était de rire. Je crois que c’est ce que nous avons réussi à faire, parce qu’il faut pouvoir avoir une certaine ironie sur les choses trop sérieuses de la vie.
C’est vrai qu’on a bien rigolé avec vous, par exemple quand vous nous avez raconté votre premier rôle au cinéma, ou plutôt, à la télévision… C’était une série, vous étiez tout petit…
J’avais cinq ans… En fait, le petit garçon qui devait tourner est tombé malade, et du coup, ma mère a dit : « Mais moi, j’ai un enfant de cinq ans ! ». Mais je n’ai jamais touché quoi que ce soit pour cette séance de travail, je l’ai jamais eu, cet argent ! (rires) Mais l’amour d’une mère est bien plus fort que n’importe quel argent.
Javier, après Nantes, vous partez en Jordanie, dans le désert. Comment se prépare-t-on à ce voyage, et qu’est-ce que vous devez faire physiquement pour pouvoir participer à ce tournage ?
J’incarne un guerrier du désert, qui a un esprit très révolutionnaire : il lutte pour les droits de sa propre tribu, mais aussi pour sauver une planète abîmée par les gens qui y habitent. Je vais apprendre aux protagonistes du film à se rebeller contre cela, contre ceux qui justement sont en train d’opprimer cette planète, et de la transformer en un désert. J’ai beaucoup d’envie de jouer ce rôle, et je suis très honoré de faire ce personnage. À part ça, il faut être en forme, donc je ne mange que de la viande et du poisson grillé, et je fais deux heures d’exercices par jour. Parce que j’ai cinquante ans, et jouer un guerrier à cet âge-là, ce n’est pas si simple que ça ! (rires)
Le tournage que vous rejoignez, c’est celui de « Dune », l’adaptation du roman culte de science-fiction de Frank Herbert, et c’est un événement majeur du cinéma mondial. David Lynch s’y était attaqué, et lui-même le dit, c’est le seul ratage de sa carrière. C’est aussi le projet inabouti d’Alejandro Jodorowsky, qui voulait réunir Orson Welles, Mick Jagger, Salvador Dalí… Vous rendez-vous compte de l’aventure à laquelle vous participez ?
Oui, je m’en rends compte et c’est pour ça que je dis que c’est un honneur pour moi de faire ce film. Je suis impressionné par le manque de pudeur qu’a ce réalisateur, d’aborder un sujet aussi impressionnant, justement au cinéma. Par rapport au scénario que j’ai lu, mais aussi aux visuels qu’il a pu me montrer, je crois qu’il va marquer son temps avec ce film. Et je crois que s’il y a bien un réalisateur qui peut faire ce film, c’est lui, parce qu’il y en a beaucoup d’autres qui s’y sont cassés les dents, mais lui, non. Je pense qu’il va réussir.
Et vous allez aussi retrouver Josh Brolin, avec qui vous aviez joué dans « No Country For Old Men ».
Josh Brolin est un grand ami, et même si je l’ai tué dans « No Country For Old Men », ça reste un grand ami ! Mais dans ce film, on n’est pas amis, hein ! Mais je sais que finalement, on ira quand même boire des verres et manger ensemble, parce que c’est une des personnes les plus amusantes que je connaisse dans le monde.
Une dernière chose : Josh Brolin a joué dans des films de super-héros, est-ce que vous, Javier Bardem, vous avez été sollicité pour incarner un super-héros dans un film ?
Je crois qu’ils ont peur de me mettre un costume en lycra, parce qu’on va voir tout mon corps un peu… (rires) Et même les meilleurs effets spéciaux ne pourront jamais faire voler ce corps ! (rires)