À la rencontre de

Lucile Viaud, la géo-verrière qui transforme les ormeaux

Inventer du verre issu d’un paysage. Rechercher des ressources délaissées pour en faire un nouveau matériau. C’est le travail de l’artiste-chercheuse Lucile Viaud.

Il a la couleur de la mer. Le « glaz » breton, synonyme des profondeurs de l’océan. Le verre que Lucile Viaud a créé est constitué de coquilles d’ormeaux et de micro-algues. C’est la base de son travail que de chercher dans un paysage les ressources délaissées, issue de l’agroalimentaire ou en attente de valorisation. « Ma consigne, c’est de ne pas acheter ou prélever dans l’environnement. Cela représente un temps important de recherche et de rencontre ». Ensuite, quand elle a trouvé la coquille d’ormeau, celle d’escargot ou un tas de sable de rivière, elle passe en laboratoire. Elle est aujourd’hui artiste-chercheuse en résidence au sein du laboratoire verre et céramique de l’université de Rennes. 

Après un patient travail, le verre peut aller chez un artisan souffleur de verre. « Je fais de la chimie du verre et je compose mes propres recettes. Il possède toutes les qualités plastiques du verre mais aussi toute une symbolique et une histoire », sourit-elle. Elle le dit elle-même, elle s’est créé « un métier qui n’existe pas », basé sur des techniques ancestrales remontant à l’antiquité égyptienne ou syrienne. Un travail qui renferme une part de mystère. « Il y a un côté magique. Vous enfournez une poudre qui n’a pas vraiment de couleur et il en ressort un verre liquide coloré dans la masse, avec des teintes très puissantes. Je n’interviens pas sur la couleur obtenue, elle découle des matières que j’utilise. Mais je me rends compte qu’à chaque fois, la couleur renvoie au paysage d’origine. C’est impalpable ». 

Le nombre de pièces est limité par la matière première. Trois cents kilos de verre sortent de l’atelier. Une paille, même par rapport aux artisans. La poésie de ce verre a trouvé sa place sur les tables des étoilés bretons, Olivier Roellinger en tête. « Moi je suis dans le contenant, eux dans le contenu, mais on raconte la même histoire, on travaille avec les espèces locales et le stock disponible. Évidemment que ça parle aux chefs », assure-t-elle. Elle veut désormais élaborer un verre des îles du Ponant. Produire un verre entre toutes les îles pour créer une filière de verre naturel des îles de Bréhat à Belle-Île-en-Mer. 

Les créations de Lucile Viaud sont à découvrir à l’Espace Mira (1 bis rue Voltaire, Nantes).