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Musique : la vérité de Zaho de Sagazan

On lui promet le plus rayonnant des avenirs. Les dates de concert pleuvent, les éloges aussi. Zaho de Sagazan est en train de se faire une place. Sans concession. Le travail paie. Rencontre.

Zaho de Sagazan est en avance. Elle attend sagement à une terrasse vue sur Loire, près du coeur de Nantes. Elle est tout juste de retour de Suisse où elle a joué au lendemain d’un concert au Printemps de Bourges et après un live au 20 heures de France 2, sous le regard bleu de Laurent Delahousse. « C’est un peu fou. Mais peut-être parce que c’est un peu fou, je ne réalise pas trop. Je suis ravie de voir que les gens aiment, que ça prend du sens après avoir passé cinq ans à travailler de manière obsessionnelle avec mes copains. »

C’est vrai que la période est dingue pour la jeune femme de vingt-trois ans, née à Saint-Nazaire et qui habite Nantes depuis six ans. Elle vient de faire la couverture de Télérama. Un joli portrait qui met en avant son regard puissant et sa blondeur, ainsi qu’un titre, « Déjà tout d’une grande ». « L’avenir nous le dira, temporise-t-elle sans absolument aucune fausse modestie. L’album n’était pas encore fait qu’on me promettait déjà d’être le futur de la chanson française. »

« Je n’ai pas envie de me lisser »

Zaho veut être jugée sur ce qu’elle fait. Sur ses chansons ciselées, sur ce qu’il se passe lorsqu’elle est sur scène. C’est pour cela qu’elle a monté son propre label avec Lucie, manageuse et « meilleure copine ». Une décision importante pour celle qui dit avoir un grand besoin de liberté. « Je n’ai pas envie de faire de concessions. Si on fait des concessions dans l’art, on ne fait plus de l’art, on fait du marketing. On a nos vérités à nous, on fait ce qu’on a envie de faire. Je n’ai pas envie de me lisser. »

Cela ne veut pas pour autant dire qu’elle n’a aucun doute – « ça fait partie de la création », assure-t-elle. Mais à l’image des artistes qui l’ont inspirée, de Brel à Stromae en passant par Billie Eilish qu’elle hisse au rang de « génie de notre époque », elle veut aller au bout de ses idées. « Il faut avoir foi en son art. Tristesse, qui marche plutôt bien, est un morceau que je n’aurais jamais imaginé en radio. »

La découverte de l’ennui

Ce chemin qu’elle trace, elle le doit en partie à sa famille et à sa ville de naissance. « On est d’où on vient. Je n’aurais peut-être pas fait ce que j’ai fait si je n’avais pas eu un papa artiste qui m’a appris à embrasser ma folie, à ne pas faire de concessions et avoir le goût du travail. Ma maman m’a donné l’envie de comprendre l’autre et transmis sa passion de Barbara et de la chanson. »

Mais, dans cette famille qui compte cinq soeurs, il y a eu aussi le moment où les aînées sont parties et où un calme inédit s’est abattu sur la maison. « J’ai découvert l’ennui, dit-elle simplement. J’ai testé le piano et ça été une révélation pour moi : le temps passait alors à une vitesse absolue. » Il y a aussi eu le lycée Aristide Briand et sa section musique, et puis la ville. « Mon côté rêveur a été très alimenté par cette ville. Saint-Nazaire est une ville où l’ennui règne, où il n’y a pas mille concerts par jour, et en même temps, on y trouve l’espace, la liberté, la plage, un côté très poétique dans ce béton vue sur mer. »

Un Zénith dans un an

L’ennui est aujourd’hui bien loin. Soixante-quinze dates de concert sont annoncées cette année. Et il en manque. Un Zénith est programmé dans un an, après un Olympia. « Ça nous excite grave avec les copains. Au Zénith, on va découvrir une autre dimension. Les concerts, c’est ce que je préfère. »

Sur scène, on la découvre en mode piano-voix. Et puis, elle nous entraîne totalement ailleurs. « Je me souviens de la première fois où j’ai dit que je voulais être au piano, et en même temps faire danser les gens comme dans un club à Berlin. Ce n’est pas évident, mais j’ai toujours cru à cette formule-là : je pense qu’en une heure et demie de concert, un humain peut avoir envie de pleurer et de danser. »

Zaho de Sagazan sera en concert au Festival des Vieilles Charrues de Carhaix le 15 juillet, aux Escales de Saint-Nazaire le 30 juillet, au Zénith de Nantes le 11 mars 2024 et au Zénith de Paris le 13 mars 2024.