Jérôme Commandeur présente Irréductible
Dans la famille de Vincent, on est fonctionnaire de père en fils. Depuis des années, Vincent profite des avantages de son statut. Lorsque le gouvernement vote un plan d’économies massives, Vincent est poussé vers la sortie. Le nouveau film de Jérôme Commandeur – acteur principal et metteur en scène d’Irréductible – nous embarque autour du monde pour suivre ce Français archétypal, râleur et roublard, qui s’accroche à son rêve d’enfance : être fonctionnaire. Une comédie familiale et grinçante qui a reçue le Grand prix au festival du film de comédie de l’Alpe d’Huez. Jean-Jacques Lester a rencontré Jérôme Commandeur pour Action – Le Mag Ciné sur France Bleu Loire Océan.
Jérôme Commandeur, vous vous êtes lancé dans un vrai marathon pour présenter ce film !
On espère atteindre les cent cinquante salles dans toute la France. Ça me fait très plaisir, parce que je suis un habitué à ça, venant du spectacle vivant, du one-man-show. C’est un peu comme une mini-tournée de théâtre, on affine son texte au fur et à mesure des cinémas. On n’est pas là que pour faire les cons parce qu’il y a aussi des vraies questions qui nous sont posées. Le public veut savoir comment se passe un casting, combien de temps on met pour tourner…
On sent que cette rencontre avec le public vous fait vraiment plaisir !
C’est vraiment un plaidoyer pour le cinéma, parce que le cinéma, ce n’est pas seulement aller voir des films. C’est aussi aller aux avant-premières, faire des rencontres, discuter avec des metteurs en scène et des comédiens qu’on n’aurait peut-être pas eu l’occasion de rencontrer autrement… Et puis le cinéma, pour moi, reste un endroit magique : on est dans le noir, il n’y a pas de téléphone, pas de cris. On est face à un écran qu’on n’aura jamais chez soi. Il ne faut pas l’oublier.
Pourquoi ce désir de réaliser des films ?
Quand on se lance, on n’a pas envie d’arrêter. On nous donne les clés du camion : on a de la latitude, on peut décider des décors, du casting, alors que quand vous êtes comédien d’un film ou d’une pièce, on vous dit « mets-toi là » et vous vous mettez là. C’est déjà super mais de pouvoir initier le projet, c’est quand même incroyable. Je pense par exemple à Daniel Auteuil qui est arrivé très tardivement à la réalisation, qui disait partout que ça ne l’intéressait pas… mais depuis qu’il y a goûté, il ne sait plus arrêter !
Irréductible, c’est l’histoire de Vincent Pelletier, que vous incarnez. C’est qui, ce type ?
Il est fonctionnaire aux eaux et forêts à Limoges. Et il y a une réforme qui dit qu’il faut mettre tout le monde dehors parce qu’il est dans une unité qui coûte de l’argent. Lui dit à l’inspectrice de Bercy : « Non mais moi je suis très bien aux eaux et forêts de Limoges, je reste ». Elle va le muter dans tous les coins les plus dégueulasses pour le faire sortir de l’administration et ça ne marche toujours pas. Elle va tenter son va-tout : elle va le muter au Groenland pour qu’il s’occupe de la sécurité des chercheurs face aux attaques d’ours. C’est là que démarre le film.
Comment vous est venu le titre du film ? C’est un clin d’œil ?
Évidemment, c’est un clin d’œil aux irréductibles Gaulois d’Astérix, et je trouve que ça nous ressemble. J’avais envie de parler de nous, les Français. C’est quoi, être Français ? C’est une question qui agite beaucoup de gens en ce moment. Moi, je trouve que c’est être des ronchons et des têtes de lard au grand cœur. On dit « non ». Je suis très Français pour ça. D’abord, c’est « non », et après, tu m’expliques ce que tu veux. Je trouve que ça nous décrit bien.
Comment est-il, cet alter ego qui s’appelle Vincent Pelletier ?
C’est un homme qui est dans bien ses chaussons. Il va se marier, il est un peu filou, un peu roublard. Il va rentrer dans un tambour de machine à laver, se faire secouer dans tous les sens de manière inimaginable et il va évoluer.
On sent quand même une vraie envie de voyage dans ce film…
Ah oui. C’est lié à la période. Le postulat de départ, la première idée qui nous a guidés, c’est de faire voyager les gens. Il faut vraiment qu’ils viennent au cinéma pour s’en prendre plein la figure, qu’ils voyagent, qu’ils oublient leurs soucis, qu’ils se marrent… Il y avait vraiment un peu ce truc comme les belles comédies populaires du dimanche soir que je regardais quand j’avais dix ans. C’était se réinscrire dans cette jolie filiation-là.
Est-ce difficile de tourner en Amazonie ?
Oui, on a tourné dans des conditions pas toujours évidentes. Je me rappelle avoir attendu que la caméra arrive, couché sur des feuilles. Sauf que ça a mis un quart d’heure et que j’étais couvert de fourmis rouges. C’est le genre de choses que, en tant qu’Européen, vous ne connaissez pas, évidemment. Je voulais que les gens puissent venir voir ça et s’évader. C’est pour ça qu’on fait ça.
Il y a beaucoup de surprises dans ce film notamment dans le casting. Pourquoi avoir
choisi Laëtitia Dosch, que l’on connaît plutôt dans le cinéma d’auteur ?
Une distribution, c’est comme un menu, on essaye d’alterner. Je trouve ça bien de ne pas avoir de famille, de chapelle, et de piocher partout. Des acteurs qui sont un peu des institutions, des icônes, qui viennent d’un cinéma plus pointu… C’est le public qui me dira si j’ai eu raison ou pas, mais moi je trouvais que ça donnait un côté un peu arc-en-ciel au casting que j’aime beaucoup.
Gérard Darmon, Valérie Lemercier et Christian Clavier sont aussi au casting. Vous les
avez choisis parce qu’ils correspondent bien aux archétypes de vos personnages ?
Quand on écrit, on a une petite voix dans la tête. On pense à la voix du comédien, à la façon dont il peut incarner un personnage. Des fois, il vous dit oui, des fois non. Le hasard, c’est que tous ont répondu oui très vite. Ils étaient très gourmands de cette expérience, parce que c’est vrai qu’on fait des métiers de gamins, quand même. On se déguise, c’est un peu comme quand les gamins emmerdent le monde dans les repas de famille en disant : « On vous a fait un spectacle », et il faut rester pour regarder le spectacle. Au final, on ne fait que perpétuer ça.
Quel message faites-vous passer à la fonction publique, avec ce film ?
L’idée, c’est de dire que rien n’est jamais perdu. C’est un message d’espoir et d’encouragements qui peut servir à plein de gens. C’est-à-dire que quand la vie vous secoue, il faut aller chercher les ressources au fond de soi et que, au bout d’un moment, on les trouve. Et il faut se dire qu’il faut se faire confiance et que tout est à construire. C’est le beau message du film, même si c’est une comédie et qu’on y va avant tout pour se marrer.
Dans les salles le 29 juin 2022