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Poly, l’histoire adaptée par Nicolas Vannier avec Julie Gayet

Nicolas Vanier, le cinéaste qui a fait découvrir le Grand Nord au grand public, continue de faire revivre les feuilletons de son enfance. Après « Belle et Sébastien », il a adapté « Poly », l’autre œuvre culte de Cécile Aubry, une série diffusée à la télévision française à partir de 1961. L’histoire d’une petite fille des années soixante qui déménage dans le sud avec sa maman récemment divorcée et qui s’attache à un poney nommé Poly. Jean-Jacques Lester a reçu le réalisateur en compagnie de Julie Gayet, qui joue la maman de l’héroïne, dans son émission Action – Le Mag Ciné sur France Bleu Loire Océan.

Julie Gayet et Nicolas Vannier | ©Pascal Kyriazis

Nicolas Vanier, vous qui nous avez fait vibrer avec vos documentaires, vous êtes devenu un fou de cinéma !

Nicolas Vanier : Je ne me sens pas comme faisant partie du monde du cinéma, mais j’aime de plus en plus le cinéma et notamment construire, avec des acteurs, des personnages. C’est quelque chose auquel je ne me pensais pas prédestiné. J’imaginais continuer comme ça, à faire des documentaires, des films sur la nature, et je prends un plaisir absolument immense à travailler avec des acteurs. Ça a été le cas dans « Poly » avec Julie Gayet, François Cluzet, Patrick Timsit, et tous ces acteurs qui m’ont fait l’amitié de m’accompagner.

Avec ce film, vous prenez de plus en plus de liberté avec le réel…

N.V. : C’est vrai que pour quelqu’un qui aime les animaux, qui aime les enfants, qui aime la nature, avoir la possibilité d’adapter une série qui en plus m’a fait tellement rêver enfant… J’étais la cible idéale ! Je me souviens avec une vraie force de ce rendez-vous avec la télévision en noir et blanc, lorsque je vivais dans la ferme de mon grand-père au milieu des chevaux et des chiens. Pouvoir partager cette histoire avec ceux qui l’ont connue et ceux qui ne l’ont pas connue, c’est un beau cadeau que la vie m’a fait.

Et vous, Julie Gayet, cette série vous avait-elle marquée ?

Julie Gayet : J’avais lu « Poly » dans la Bibliothèque verte, je n’avais pas vu l’adaptation. Ce film a été pour moi un moment où je suis partie dans une aventure de trois mois. Pendant trois mois, on n’a pas fait autre chose. On part dans la nature avec les animaux. Nicolas, il nous parle à nous comme il parle aux animaux, comme il parle aux enfants. Il n’y a pas de différence. Quand on s’est rencontré, il m’a dit : « tu ne pourras pas faire d’allers-retours sur d’autres films » – c’est ce qu’on fait habituellement quand on est comédien. Donc on embrasse cette aventure avec lui. 

Quel souvenir gardez-vous de ce tournage ?

J.G. : Je me suis retrouvée dans la vallée de la Cèze, dans le Gard. C’était merveilleux. Franchement, c’est une expérience, faire un film avec Nicolas. On découvre la nature. Tout dans le film est vrai. Il y a des plans de papillons, d’oiseaux… Il veut que tout soit tourné sur place. C’est magique. Moi, j’étais une petite fille.

Dans le film, vous n’êtes pas une petite fille, mais la mère de Cécile, l’héroïne… 

J.G. : Dans la série originale, le héros, c’était un petit garçon, Mehdi. Et là, Nicolas a eu l’intelligence, l’élégance de transformer le héros en petite fille qu’il a baptisée Cécile, en hommage à Cécile Aubry. Voilà, ça y est, c’est un peu le tour des femmes. Peut-être qu’il m’a choisie pour ça aussi, moi qui défends tellement cette égalité homme-femme.

Nicolas Vanier, pourquoi avez-vous eu envie de voir le personnage de Mehdi devenir Cécile ?

N.V. : Après « Belle et Sébastien », avec un petit garçon comme personnage principal, je trouvais ça chouette d’avoir une petite fille. Au cours de ma vie, j’ai beaucoup côtoyé le monde des chiens de traîneau et j’ai été très frappé de voir à quel point les femmes avaient souvent une relation très forte avec les animaux, peut-être même plus forte que ce que les hommes parviennent à obtenir. Elles ont peut-être une sensibilité, une force qui leur permet d’atteindre une relation plus profonde. C’est quelque chose qui m’a frappé et qui fait que peut-être, d’ailleurs, 80 % des enfants inscrits dans les poney clubs, ce sont des petites filles. J’ai trouvé ça chouette d’avoir cette petite héroïne, et puis c’était peut-être aussi une façon de convaincre Julie de faire le film (rires). 

Julie Gayet dans le rôle de la mère-divorcée

Julie Gayet, vous êtes transposée dans le rôle d’une mère des années soixante. Ça vous a plu ?

J.G. : C’était assez merveilleux de replonger dans cette époque. Je me suis inspirée de Sylvie Vartan, j’avais une frange, c’est la magie du cinéma !

J’ai surtout noté une ressemblance avec Grace Kelly, surtout au début. Vous avez quelque chose de chic et simple. 

J.G. : C’est très gentil, c’est un beau compliment. Pourtant, cette maman qui part avec sa fille doit se réinventer. C’est un très très joli rôle. Une mère indépendante qui va élever sa fille seule, qui retourne en province donc elle est un peu pointée du doigt mais, en même temps, cela la rapproche de sa fille. 

Dans le film, vous êtes une femme divorcée… Vous êtes donc dangereuse pour les autres femmes !

J.G. : Surtout qu’à cette époque, les femmes divorcées étaient rares… On ne se rend pas compte à quel point, quand même, il y a eu des avancées pour les femmes en cinquante ans. Finalement, le MLF, c’était il y a cinquante ans ! Le film se passe juste un peu avant mai 68. Les femmes avaient encore besoin de l’autorisation de leur mari pour ouvrir un compte en banque… Il n’y avait pas encore la mini-jupe à cette époque, mais il y avait le pantalon. Déjà, l’arrivée du pantalon montre dans le film combien c’était moderne.

Vous donnez d’ailleurs des cours de conduite en cachette à la femme du boulanger. Nicolas Vanier, pourquoi avez-vous eu envie de montrer cet aspect des choses ?

N.V. : Je ne crois pas me tromper en disant que ma grand-mère aurait aimé se séparer de mon grand-père. Mais à l’époque, la question ne se posait même pas. Aujourd’hui, dans une classe, la moitié des enfants sont issus de familles recomposées. Tout va bien. À cette époque, c’était quelque chose. Et puis, cette femme, divorcée, elle est assez jolie, pour ne pas dire très jolie. Ça ajoute aux problèmes. Au travers de cette aventure, on voit finalement l’acceptation de cette petite fille et de sa mère dans le village.

Julie Gayet et Nicolas Vanier s’amusant au babyfoot | ©Pascal Kyriazis

Le regard sur cette époque fait passer un message sur le monde dans lequel nous vivons…

N.V. : Le film permet en effet de faire passer un certain nombre de messages. On parle de féminisme, mais il y a aussi le moment où la petite fille refuse de continuer à manger de la viande. Dans le contexte actuel, avec les problèmes de réchauffement climatique, de disparition de toutes ces espèces, je pense que ça prend une valeur toute particulière.


« Poly » de Nicolas Vannier, sortie en salle le mercredi 7 octobre

Bande-annonce du film « Poly »

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