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Ciné : On ne meurt jamais d’une overdose de rêve, Claude Lelouch

Claude Lelouch est venu à Nantes présenter Finalement, une fable musicale qui est son cinquante et unième film. Il a choisi Kad Merad pour interpréter un avocat qui serait trompettiste de jazz. Un premier rôle qui lui va comme un gant. Les deux stars ont été reçues par Jean-Jacques Lester pour France Bleu Loire Océan

Une fable musicale mise en vie, c’est comme ça que vous présentez le film…

Oui, parce que j’ai toujours eu le sentiment que j’étais plus un metteur en vie qu’un metteur en scène. La mise en scène, c’est pour le théâtre, la mise en vie c’est pour le cinéma. Le cinéma est un art contemporain : il faut avoir un esprit de synthèse. Je me donne beaucoup de mal pour qu’on croie aux histoires que je raconte, pour que mes films ne soient pas du cinéma. Ça paraît idiot, mais c’est comme ça que j’ai essayé de faire ces cinquante et un films. J’ai envie qu’on croie à ces histoires que je raconte d’autant qu’elles sont inspirées de faits divers ou de dialogues que j’ai entendus.

Kad Merad, est-ce que cette mise en vie vous la ressentez sur le plateau et est-ce que vous oubliez que vous jouez ?

C’est tout à fait juste. Quand on est acteur, et qu’on se retrouve sous la direction de Claude Lelouch, on ne vit pas un film comme les autres. Pourtant j’en ai fait quelques-uns, des tournages ! J’ai presque redécouvert le métier d’acteur, avec toute cette liberté, ces surprises, cet inattendu en permanence. Il y a un scénario, on le connaît, mais vous savez, entre le film que j’ai lu et le film que j’ai vu, il s’est encore passé des choses. C’est ça qui est assez magnifique. Avec Claude, ce qu’il faut faire c’est ne pas chercher à douter. On doit le laisser faire, se laisser porter par son regard d’enfants et son envie de cinéma qui ne le quitte jamais. Il a beau avoir quatre-vingt-sept ans, c’est incroyable ! Dans ce film, il y a une fougue, il y a une jeunesse. C’est « l’aventure c’est l’aventure ». On est emporté.

Claude Lelouch, dans le film, vous faites apparaître Barbara Pravi, la chanteuse. Elle est incroyable.

Pour moi, a star is born. Elle va faire une entrée fracassante. Elle est magique, merveilleuse, et comme elle chante très bien, j’en ai profité.

Une phrase qui m’a marqué dans votre film, c’est « on a tous besoin d’enlever ses chaussures ». Qu’est-ce que vous avez voulu dire à travers ça ?

On a besoin à un moment donné de liberté. On a fabriqué un monde de contraintes. Un monde qui nous interdit la plupart des choses. Même quand on est dans une prison dorée, on est dans une prison. Ce sont ces parfums de liberté et de vérité dont on a le plus besoin que j’ai essayé de filmer – avec toute cette équipe de comédiens, et évidemment avec Kad, le leader et la colonne vertébrale de ce film –, et qui permettent tous les ricochets nous donnant envie de rêver un peu plus que d’habitude, puisqu’on ne meurt jamais d’une overdose de rêve.

Et pourquoi Kad Merad ?

D’abord, j’ai pensé à tous les acteurs, sauf à lui. C’est le hasard. Les acteurs auxquels je pensais ne cochaient pas toutes les cases dont j’avais besoin. Mais un jour ma femme a pris un train dans lequel il y avait Kad Merad qui revenait de son mariage et ils ont discuté tous les deux. Kad a eu la bonne idée de flatter mon ego en disant : « J’aimerais bien tourner avec Claude Lelouch. » C’était un de ses rêves. Ma femme m’a appelé et m’a raconté qu’elle était à côté de Kad Merad. Et là je me suis dit : « Mais c’est lui ! Mais c’est lui ! » Je n’y avais pas pensé, j’ai pensé à lui sans y penser, c’est encore plus fort, plus merveilleux ! Il se révèle absolument incroyable dans ce film. Et puisqu’il est à côté de moi, je le remercie encore une fois.

Époustouflant Kad Merad. Alors, comme ça, on rêve de tourner avec Claude Lelouch ?

Mais toute sa vie on rêve de tourner avec Claude Lelouch ! Moi, j’ai soixante ans, et Claude, il a soixante ans de carrière. Quand vous commencez, vous avez déjà les premiers films de Claude, des films inoubliables avec de grands acteurs. Quand vous rêvez d’être acteur, c’est normal de se dire un jour : « Je rêverais de tourner avec Claude. » C’est un grand cinéaste, il n’en reste plus beaucoup des comme ça, vous savez ? Lelouch, il est connu dans le monde entier. Stanley Kubrick a eu envie de faire des films en voyant La Bonne Année. Martin Scorsese l’appelle pour lui demander des conseils… C’est ça, Claude Lelouch, quand même !