Culture,  Lecture

Julia Kerninon : Femme, écrivain et mère

Toucher la terre ferme, le dernier ouvrage de l’autrice nantaise Julia Kerninon, propose le récit intime d’une femme devenue mère.

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« Ce n’est pas un livre qui donne des leçons de vie. J’avais envie de raconter ce qui m’a surprise dans le fait d’être mère. Ce qui était bouleversant. » Julia Kerninon* se livre dans Toucher la terre ferme, un récit autobiographie, un « fragment », selon ses termes. « En fait, j’écris mon autobiographie sous forme de cycles, sans que personne s’en rende compte », sourit l’autrice. Elle a commencé ce long travail d’introspection avec un autre récit, Une activité respectable, qui traite de son envie d’écrire. 

« J’ai compris, en faisant ce livre, que c’est lorsque je suis la plus personnelle dans le récit que je suis la plus universelle. Si je veux que l’histoire parle au lecteur, il faut une vérité. » La vérité de Julia Kerninon s’inscrit sans fard autre que son style. « J’étais là, un bébé parfait dans mes bras, et mon corps déchiré. Je ne savais pas encore que la loi avait changé en mon absence, que le pays que j’avais toujours habité n’existait plus, ne serait plus jamais le même », écrit-elle. 

« On se raconte n’importe quoi, sans rougir »

Une introspection où elle ne s’épargne pas. Pas question de se transformer en mère mythique ou de se mettre au centre d’une éducation parfaite prodiguée à ses enfants. Quelle superhéroïne de la parentalité accepterait d’écrire : « Sur le parking de la maternité, mère pour la première fois depuis moins de vingt-quatre heures, quand je suis descendue respirer l’air froid de l’automne juste pour être seule un instant, j’ai pensé à fuir » ? Au travers de ce récit, c’est une femme qui s’interroge, s’ausculte, s’analyse. « Un des motifs d’être de ce livre, c’est que je veux participer à la représentation des sujets féminins dans la littérature. Le point de vue des femmes est sous-représenté. » 

Elle convoque et fait défiler ses amours, ses amies. Raconte une partie de ce qui l’a construite en tant que femme, sans fausse pudeur mais avec des mots soigneusement pesés. Un récit qui interpelle. « En librairie, beaucoup de femmes plus âgées que moi me disent ne s’être jamais posé de questions sur la maternité, raconte-t-elle. Peut-être que ces femmes n’avaient pas la parole aussi déliée avec leurs copines. Aujourd’hui, j’ai le sentiment qu’un gynécée se remet en place. On se raconte n’importe quoi, sans rougir. » 

Toucher la terre ferme, Éditions de L’Iconoclaste

*Julia Kerninon est également l’autrice de la chronique qui ouvre chaque numéro d’Urbanne.

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