Habitat

Immobilier en tension. Un manque de biens sur le marché morbihannais

Le neuf en plein boom

Le marché de l’ancien n’est pas le seul à être actif. Celui de la construction neuve également. Les terrains s’arrachent et les projets affluent. Décryptage.

« Je n’ai jamais signé autant de clients que depuis l’année qui vient de s’écouler ». Frédéric Daniel, directeur commercial chez Axxens Crehabitat, est formel : son secteur d’activité, la construction de maisons neuves, a le vent en poupe. « C’est une activité extrêmement soutenue. Les gens quittent les grandes métropoles, Nantes, Rennes, Angers, Le Mans, pour venir s’installer ici ». Une hausse de la demande qu’il remarque sur tout le secteur où intervient l’entreprise, le sud-Morbihan, de Vannes et Auray à Lorient.

« Nous réalisons aujourd’hui 20% de notre activité avec des acheteurs de l’extérieur du département. Il y a quelques années, cette population ne représentait que 5 à 10% de l’activité, et principalement pour construire des résidences secondaires. Aujourd’hui, clairement, les gens viennent vivre ici ». Quadras, quinquas, souvent avec enfants ou ados, veulent goûter à la qualité de vie de la Bretagne sud.

Les gens viennent vivre (et télétravailler) ici

« La demande n’est pas forcément d’habiter à proximité immédiate de la plage. Cela ne dérange pas cette population de vivre à Saint- Avé ou Grand-Champ, à dix ou quinze kilomètres de la côte. Ils savent que les enfants peuvent prendre le bus pour aller à Vannes et qu’ils seront en quinze minutes à Conleau. Ce qu’ils veulent, c’est une maison, un jardin et être à proximité de tout ce qui fait le bonheur de vivre dans la région. Ils savent qu’en vendant leur grand appartement à Rennes, Angers ou Nantes, ils pourront s’offrir ce changement de vie ».

Corollaire de ces choix de vie : le télétravail s’invite durablement dans les intérieurs. « J’ai de plus en plus de demandes pour des bureaux en plus du nombre de chambres que la famille aurait de toutes façons demandé. Il y a un besoin d’une pièce dédiée, où l’on peut revenir travailler le lendemain en laissant les dossiers ouverts. C’est une demande récurrente depuis un peu plus d’un an », souligne Frédéric Daniel.

Ne pas confondre vitesse et précipitation

Mais la difficulté dans ce marché tendu, où l’offre est bien inférieure à la demande, c’est de résister à la tentation de se jeter sur un terrain juste parce qu’il est disponible. « C’est pour cela que nous avons choisissons d’informer nos clients. Quitte à leur dire que le terrain qu’ils ont choisi ne leur conviendra pas, selon nous. Il ne faut pas agir de manière inconsidérée et rester dans une réalité de marché : un bien bien placé, bien conçu et bien construit ».

Le foncier est donc de plus en plus rare. « Cela a toujours été un souci dans la région, tempère Frédéric Lécuyer, gérant de Sweetwood Homes. Mais il y a du turn over et celui ou celle qui cherche trouve, à condition de s’armer de patience ». Le spécialiste de la construction de maison à ossature bois type balnéaire ou américain met lui aussi en garde : il ne faut pas se précipiter dès qu’un terrain est disponible. « Même avec un marché aussi tendu qu’aujourd’hui, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. On a toujours le temps de vérifier le droit à construire, la viabilisation et de prendre rendez-vous en mairie. Nous sommes aussi là pour ça ».

Très chères matières premières

Il est donc urgent de rependre son temps, même dans le contexte actuel. « Il y a une forme de fébrilité ambiante qui n’est pas forcément très saine. On veut tous avoir son chez-soi très vite, un endroit sécurisé dans un monde anxiogène. Le problème, c’est que cette fébrilité peut conduire à un manque de lucidité ».

D’autant que le marché de la construction subit une autre pression : la course aux matériaux. La reprise mondiale qui se profile crée une tension énorme. « Les États-Unis et la Chine achètent tout, résume Frédéric Lécuyer. Le bois, par exemple. Le bois français part se faire transformer en Chine. Toute la filière du bâtiment, du charpentier au maçon qui a besoin de bois pour coffrer, se retrouve impactée ». Résultat : les prix de la construction augmentent déjà. L’OSB, ces panneaux de bois compressé très utilisés dans la construction ou l’aménagement intérieur, a vu son prix multiplié par deux. « Nous allons avoir de gros soucis si l’État ne fait pas quelque chose dans les mois qui viennent. Il faut être extrêmement attentif, il y a des solutions à tout, mais il faut être vigilant ».

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