Food,  Rencontre

Pierre Gagnaire : « Je suis un caméléon »

Pierre Gagnaire signe la carte du Fouquet’s installé dans les murs du Royal à La Baule depuis près de dix ans. Le chef à la galaxie d’étoiles y applique toute sa philosophie : être juste et inventif.

Pierre Gagnaire arrive un peu en retard, au sortir d’une cuisine où il vient de vérifier une dernière fois le menu qui doit être servi le soir même. Peut-être est-ce l’une des clés de la réussite du chef aux treize étoiles : même à La Baule, on ne se repose pas sur ses lauriers. En neuf ans, Pierre Gagnaire a su parfaitement se fondre dans l’esprit du Fouquet’s : une cuisine généreuse et inventive, une belle brasserie parisienne. « Moi, je suis un peu un caméléon, reconnaît-il. J’ai bien sûr une idée directive de ce que je défends, mais je m’adapte. Je m’adapte aux gens, je m’adapte au temps, je m’adapte au lieu où je suis ». Le Fouquet’s de La Baule reprend tous les codes parisiens, les magnifiques photos de stars en noir et blanc signées par Harcourt et la jolie signature dorée. « Le Fouquet’s de La Baule n’est pas celui de Paris et celui de Paris n’est pas celui de Cannes, voilà. Chaque lieu a un peu son identité ». À La Baule, le chef injecte un peu d’iode, de jolies algues, des poissons. « Il faut être modeste, aussi. Parce que ce qu’on fait ici, on le fait avec les équipes. Il y a une culture dans chaque entreprise et il ne faut donc pas arriver avec ses gros sabots. Il faut s’adapter aux hommes, il faut s’adapter aux produits. Il faut être agile. »

Le cuisinier de soixante-quatorze ans, élu meilleur cuisinier du monde en 2015, n’a pas fini de réfléchir et les étoiles n’ont pas éclipsé son intérêt pour son métier. Alors que l’inflation rebat les cartes jusque sur les cartes des restaurants, il ne baisse pas les bras. « J’ai une culture humble de mon travail. Je viens d’une ville modeste, Saint-Étienne, et même si j’ai pris un peu mes aises à Paris, je reste attaché à la qualité extrême, mais à la modicité de l’engagement en matériel et en homme. Dans l’époque où l’on vit, c’est capital. » Une époque où les aspirations des collaborateurs évoluent, même dans la haute gastronomie. Il est de plus en plus difficile de recruter des personnes qui vont travailler en coupure, c’est-à-dire midi et soir, dans la restauration. « Il y a un engagement un peu moins brutal dans le métier, mais ce qu’on perd en présence, on le gagne en cuisine en interne, en énergie et en intelligence. Aujourd’hui, je rencontre des gens plus fins, plus curieux… C’est finalement très positif. »

Le Fouquet’s

Hôtel Barrière Le Royal La Baule
6 avenue Pierre Loti, La Baule-Escoublac